« Il faut arriver à une situation où un maximum d'acteurs est concerné par les impôts. Il seraient ainsi possible d'élargir l'assiette fiscale en réduisant la pression fiscale supportée par un nombre réduit d'acteurs économiques »
Entrées en vigueur depuis le mercredi 02 janvier 2019, les mesures contenues dans l'annexe fiscale à la Loi de finances n°2018 – 984 du 28 décembre 2018 portant Budget de l'État pour l'année 2019, continuent de susciter des commentaires. Koné Drissa, président de l'Ordre des experts comptables de Côte d'Ivoire a confié, au cours d'une entretien, que ces mesures sont favorables pour certaines Petites et moyennes entreprises (Pme).
Quelle est la spécificité de l'annexe fiscale 2019 ?
La spécificité de cette annexe fiscale c'est qu'elle garde certaines dispositions très ciblées. Par exemple les mesures de soutien aux entreprises.
L'une d'elles parle de mesures d'incitation fiscale au profit des Pme. Elle porte sur l’exonération de la contribution à la patente pendant une période de 5 ans. Il est clair que cette mesure est intéressante pour les entreprises qui ont des investissements beaucoup plus importants. Mais pour les autres, elle peut l'être moindre.
Réduire de 25 % l'impôt foncier dû pendant deux années sur les immeubles nouvellement acquis pour les besoins de leurs exploitations, est une disposition pour les Pme qui ont pu avoir des immeubles, mais pour la plupart quand elles démarrent leurs activités, elles sont peut-être en location. C'est dire que ces mesures ne concernent peut-être pas un large panel d'acteurs. C'est la raison pour laquelle, avec des instances comme la Confédération générale des entreprises de Côte d'Ivoire (Cgeci) et la Fédération des Pme, l'on apprend que le dialogue continue sur ces sujets. La Plateforme mise en place entre le secteur public et le secteur privé, est louable.
Les Pme peuvent-elles tirer véritablement profit des dispositions prises à leur endroit dans le cadre de l'annexe fiscale 2019 ?
Contrairement à l'annexe fiscale de 2018 où, à l'issue de la proclamation, il y a eu un ensemble de mouvements qui ont conduit le chef de l'État à demander son interruption, en attendant de trouver des mesures consensuelles, cette année, il y a tout un ensemble de discussions qui ont été conduites et le résultat semble être un résultat de consensus, même si des opérateurs économiques, des Pme et même de grandes entreprises n'y trouvent pas encore forcement leurs comptes.
Ce qu'il faut savoir, c'est qu'une annexe fiscale est un arbitrage entre la volonté de l'État de collecter le maximum de ressources pour lui permettre de mener à bien sa mission et celle de l'ensemble des opérateurs économiques qui voudraient avoir un certain soulagement qui leur permet de continuer à développer leurs activités.
En ce qui concerne les Pme qui sont visées par un certain nombre de dispositions de l'annexe fiscale, il est clair que les mesures sont favorables pour certaines d'entre elles, mais les attentes restent encore très fortes.
Quelles sont vos propositions ?
Les échanges dans un cadre inclusif et participatif doivent aider à parvenir à une fiscalité de développement. Ce qu'il faut noter, c'est que de manière progressive, il faut qu'on en arrive à la fiscalité de développement. C'est-à-dire une fiscalité qui consiste à voir quelles sont véritablement les dispositions ou les mesures fiscales qu'on peut mettre et pour lesquelles les acteurs du secteur privé y trouveraient véritablement leur compte. Mais, avec un comportement citoyen. Parce que l'idée derrière tout ça, c'est d'arriver à une situation où un maximum d'acteurs est concerné par la question des impôts. À ce stade, il sera possible d'élargir l'assiette fiscale en réduisant la pression fiscale supportée par un nombre réduit d'acteurs économiques. On arrivera ainsi à alléger le poids fiscal individuel. Le nombre d'acteurs étant plus important, ça permettra à l'État d'atteindre ses objectifs budgétaires sans exercer une forte pression sur les acteurs. Parce qu'en fait, le vrai problème de nos économies, et ce n'est pas seulement l'économie de la Côte d'ivoire, c'est le secteur dit informel. Et, c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles nous, en tant qu'experts comptables, encourageons les opérateurs économiques à tenir une comptabilité, parce que le premier élément qui permet de dire que ton entreprise va bien ou va mal, ce sont les états financiers dont tu disposes. Vous voulez un financement auprès d'une banque, si elle ne sait pas si vous allez être capable de rembourser, ça va être difficile que vous obtenez ce prêt.
Irène BATH(linfodrome.com/)