Le poste était vacant depuis la nomination surprise du gouverneur Tiémoko Meyliet Koné au poste de vice-président de Côte d’Ivoire, le 19 avril. La Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest a choisi, le 30 avril 2022, de le remplacer par un vice-gouverneur, Norbert Toé. Cette nomination « par intérim » prend effet immédiatement.
Ancien cadre du FMI, organisme où il a effectué l’essentiel de sa carrière, le Burkinabé était vice-président de la BCEAO depuis le 21 septembre 2018.
Le nouveau gouverneur présente un profil classique, si ce n’est qu’il a effectué ses études dans trois pays, le Burkina Faso, le Cameroun, et la France. Où il a obtenu, en 1983, un doctorat de troisième cycle en Économie monétaire, délivré par l’université Paris Dauphine.
Il entre au FMI la même année, rejoignant le bureau de l’administrateur chargé de suivre 24 pays africains francophones et lusophones. En 1979, il avait obtenu une maîtrise en Économie, analyse et politique économique, à l’université de Douala (Cameroun).
C’est un homme discret, peu connu du grand public. Son nom avait circulé, en 2016, parmi les prétendants au poste de Premier ministre du Burkina Faso, mais le Président fraîchement élu, Roch Marc Christian Kaboré, lui avait préféré Paul Kaba Thieba.
Revenons sur un impressionnant parcours : Dès 1985, Norbert Toé devient conseiller principal de l’administrateur du FMI auquel il était rattaché depuis deux ans. Il a notamment participé, durant une dizaine d’années, à plusieurs missions de consultations des services du FMI auprès des pays africains figurant à son « portefeuille ». Il a représenté son institution aux réunions annuelles des groupes des gouverneurs africains de la Banque mondiale et du FMI. Y préparant, à l’occasion, les documents nécessaires aux quatre bureaux des administrateurs africains.
Il a occupé d’autres fonctions au FMI à partir de 1995. Notamment celle de représentant résident au Gabon, inaugurant le bureau du Fonds dans le pays, en 1999. Il a assisté le pays qui a conclu programme économique et financier appuyé par l’institution de Washington.
Projecteurs sur les Banques centrales
Norbert Toé a, durant cette période, participé à l’organisation du Sommet des chefs d’État et de gouvernement qui avait pour thème « Agenda pour l’Afrique à l’orée du troisième millénaire, croissance et réduction de la pauvreté en Afrique subsaharienne ».
Par la suite, Norbert Toé a participé à la création du Centre régional d’assistance technique, Afritac Ouest, avant de diriger cet organisme jusqu’en 2006. L’Afritac avait alors atteint la maturité de son action. Cet organisme, alors situé à Bamako (Mali) contribue au renforcement des capacités dans les pays membres.
Jusqu’en 2018, Norbert Toé a, pour le compte du FMI, été en charge de divers dossiers sensibles, se penchant sur la destinée de pays aussi différents que la Sierra Leone, le Swaziland (devenu Eswatini), la Namibie, la République centrafricaine (RCA), la RD Congo et le Bénin. Sa mission était, entre autres, d’appuyer les pays les plus endettés désireux de bénéficier de l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés) et de l’allègement de leurs dettes. Il a aussi aidé la Centrafrique à boucler un programme économique et financier, en 2012. Et est intervenu en RD Congo alors que le FMI avait brutalement mis fin au programme appuyé par la Facilité économique de crédit (FEC).
Reste à savoir si le poste de Gouverneur « par intérim » sera transformé en poste plus pérenne. Le mandat de six ans de Tiémoko Meyliet Koné n’arrivait à expiration qu’en 2026.
Cette nomination intervient à un moment où le rôle des Banques centrales, un peu partout dans le monde, redevient crucial. En effet, comme le souligne le FMI dans sa dernière étude sur l’Afrique subsaharienne (suivre le lien ci-dessous), les institutions monétaires doivent à la fois veiller à ne pas laisser filer la hausse des prix, et à ne pas compromettre la reprise économique « post-Covid » par des hausses de taux d’intérêt trop fortes. D’ailleurs, la BCEAO a décidé, lors de la dernière réunion de son Comité de politique monétaire, de ne pas augmenter ses taux d’intérêt. Au contraire de la Banque centrale des États de l’Afrique centrale, par exemple. Source: magazinedelafrique.com